La Roumanie parviendra-t-elle à assumer les crimes du régime communiste ?

Vingt-cinq ans après la chute d’une des dictatures communistes les plus dures d’Europe, un procès historique s’est ouvert en Roumanie. Pour la première fois, un ancien commandant d’une prison politique communiste comparaît devant un tribunal pour crimes contre l’humanité.

Alexandru Visinescu, 89 ans, est accusé d’avoir contribué à mettre en place « un régime d’extermination » des détenus politiques dans la prison de Râmnicu Sarat, entre 1956 et 1963, au plus fort de la vague de répression d’inspiration stalinienne menée par les autorités roumaines.

À l’occasion de son procès, le premier consacré spécifiquement à la répression brutale des années 1950 et 1960, Isabelle Wesselingh dresse, dans cette Note de l’IHEJ, un bilan de vingt-cinq ans de justice de transition en Roumanie. Elle se penche particulièrement sur l’action de la justice pénale et analyse en profondeur la nouvelle étape que constitue ce procès pour crimes contre l’humanité.

Jusqu’à présent la justice roumaine n’avait en effet poursuivi quasiment aucun responsable pour les violations des droits de l’homme commises durant les 40 ans de régime communiste, se contentant de procès, souvent expéditifs, ciblés uniquement sur les événements de 1989 qui conduisirent à la chute du dictateur Nicolae Ceausescu et firent un millier de morts.

A l’exception de l’ex-Allemagne de l’Est, l’organisation de procès d’anciens responsables et exécutants de haut rang des régimes totalitaires s’est révélée difficile en Europe orientale, laissant un goût amer chez les victimes. La présence d’anciens apparatchiks dans les nouvelles structures démocratiques de certains États constitue une des explications pour ces « ratés ».

La Note s’attache ainsi, dans une seconde partie, à comparer, sans viser l’exhaustivité, les processus de justice transitionnelle en cours en Roumanie avec ceux d’autres pays de la région comme l’ex-Allemagne de l’Est et la Pologne soumis à des régimes basés sur la même idéologie.

Elle montre que la justice « de transition » ou « reconstitutive » a su prendre d’autres formes pour tenter de cicatriser les profondes blessures de sociétés laminées par des dizaines d’années de totalitarisme : lustration, réhabilitation des condamnés politiques, compensations et accès des citoyens aux dossiers de surveillance constitués par les polices politiques.

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