Un état des lieux de la justice en Syrie

Cette note a pour objectif de présenter l’état de la justice dans la Syrie actuelle sur la base de plusieurs sources. Quels sont les recours mis en place pour pallier aux vides juridiques causés par le conflit ? Dans quelle mesure peut-on parler d’impunité des forces armées ? Qui sont les acteurs de cette justice alternative et à quelles difficultés sont-ils confrontés ? En outre, quelles sont les implications de cette situation sur le processus de justice transitionnelle ?

De nombreux cabinets de conseils et ONG se sont penchés sur la question de la justice transitionnelle en Syrie. Il y a eu une production importante de documents en 2013 qui contraste avec une baisse sensible de publications en 2014 et 2015. Cette diminution peut s’expliquer par l’évolution rapide de la situation sur le terrain et notamment par l’expansion de Daesh qui rend l’analyse de données difficile. Les luttes de pouvoir sur le terrain sont donc des éléments à prendre en compte pour l’analyse de l’état de la justice en Syrie. Nous la ferons par l’emploi de deux sources journalistiques arabophones exprimant des sensibilités politiques différentes : le quotidien Enab Baladi et le journal Al-Tishreen.

Parmi les rapports consultés, celui publié en février 2013 par le PILPG – en collaboration avec le Syrian Justice and accountability center- sur le processus de justice transitionnelle en Syrie, offre des éléments introductifs utiles. D’une part, ce document fournit des informations sur les structures mises en place par les forces de l’opposition. D’autre part, il souligne l’importance des structures institutionnelles déjà existantes sur le territoire syrien. En annexe de cette note, figure la liste des acteurs qui participent à la collecte des preuves afin de faciliter le processus de justice transitionnelle. C’est une ressource précieuse pour établir une base de données cohérente et ainsi faciliter les enquêtes d’une éventuelle juridiction.

À Alep il est évoqué la création d’une autorité judiciaire largement dominée par les cours « chariatiques »(cf : infra). Mais le point à retenir ici c’est qu’un comité d’avocats d’Alep travaille au maintien d’un système judiciaire entre droit communautaire et droit continental. Ce comité fourni des réflexions sur les principes légaux applicables en période de conflit et affirme son attachement à l’État de droit.

Concernant les structures institutionnelles héritées du passé, ces dernières nécessitent certes une réforme afin d’être crédibles mais elles constituent une ressource et un réservoir important de juristes, avocats et juges. Afin que la justice nationale soit associée aux efforts de justice transitionnelle, de nouvelles lois organisant le fonctionnement de la justice ainsi qu’un processus de réhabilitation des magistrats devront être mis en place. Rappelons ici que le système judiciaire syrien est, depuis 1973, calqué sur le modèle français, exception faite des cours religieuses chargées de régler des conflits communautaires. On dénombre trois cours religieuses : la Cour chariatique, la Cour doctrinale et la Cour spirituelle. La première traite les affaires impliquant des musulmans, la seconde des chrétiens et/ou des juifs et la dernière des affaires impliquant des minorités, druzes par exemple. Ce système de Cours a été préservé dans la plupart des régions sous contrôle du régime, mais parfois également dans des territoires sous contrôle de l’opposition syrienne.

Lire la suite sur le site de l’IEDJA